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Le nerf de la guerre

Par Banque du Canada    |   Lundi le 1 décembre 2008

The Sinews of War

Les guerres laissent dans leur sillage des sociétés dévastées. À l’indicible souffrance humaine et aux innombrables pertes de vie s’ajoutent la destruction et les occasions manquées - des coûts économiques incalculables, même pour les vainqueurs. Lorsqu’un pays appelle ses soldats sous les drapeaux, il mobilise en même temps son appareil économique en reportant l’ensemble de ses ressources sur l’effort de guerre. Et comme cette réorientation de la production est coûteuse, le système monétaire et financier est lui aussi mis à contribution. L’État lève des impôts et vend des obligations à ses citoyens, misant sur leur fibre patriotique et sur l’attrait des incitatifs pécuniaires qu’il offre. L’homme d’État romain Cicéron avait donc bien raison quand il affirmait que l’argent était le « nerf de la guerre ».

Dans l’Antiquité et au Moyen Âge, certains chefs d’État ont altéré ou rogné leur monnaie pour financer leurs campagnes. De nos jours, les gouvernements parviennent aux mêmes fins en augmentant la production de papiermonnaie. Dans un cas comme dans l’autre, l’opération provoque une poussée inflationniste, que l’on cherche souvent à contenir, au moins un certain temps, par l’imposition de mesures de rationnement et de contrôle des prix et des salaires.

L’argent en circulation subit lui aussi les effets des conflits armés. À l’époque de l’étalon-or, il n’est pas rare que les pays belligérants suspendent la convertibilité en or de leurs billets pour consacrer leurs métaux précieux au financement d’importations essentielles liées à la guerre. Conformément à la loi de Gresham, selon laquelle la mauvaise monnaie chasse la bonne, les pièces d’or et d’argent disparaissent alors rapidement, cédant le pas aux billets.

L’argent fait aussi partie de l’arsenal de guerre, comme en fait foi l’opération Bernhard : la Seconde Guerre mondiale fait rage lorsque les Allemands tentent de déstabiliser le système monétaire britannique en écoulant de faux billets de la Banque d’Angleterre dans les pays neutres. Le Japon use d’une autre stratégie pour saboter l’économie de la Chine : il produit illicitement des billets chinois à l’aide de plaques à graver saisies. En outre, tant les puissances alliées que les forces de l’Axe distribuent des tracts de propagande imitant des billets authentiques.

À défaut de cuivre et de nickel - indispensables à la fabrication des armes - les établissements monétaires nationaux se replient sur des métaux moins coûteux et moins recherchés, comme l’aluminium, le bronze, le fer et le zinc, pour frapper des monnaies de nécessité. Parallèlement, des billets de petites coupures sont mis en circulation

En temps de guerre, pour payer leurs soldats, les autorités militaires émettent souvent des billets spéciaux échangeables dans les zones de conflit, mais qui n’ont habituellement pas cours légal dans la mère patrie. Bons d’échange et jetons circulent aussi largement dans les bases militaires, où la petite monnaie est souvent rare.

Dans les camps d’internement et de prisonniers de guerre, l’accès à la monnaie locale est interdit aux captifs pour décourager les projets d’évasion. De là naît une économie basée sur les coupons, ou certificats, délivrés par l’administration du camp et que les détenus peuvent troquer à la cantine.

Il existe dans les prisons allemandes une autre monnaie d’échange, rendue populaire par les soldats alliés qui y sont incarcérés : facilement transportables, divisibles, difficiles à contrefaire et disponibles en quantité limitée, les cigarettes constituent en effet un moyen efficace de se procurer des produits de base. Une économie libérale s’installe dans les camps, où la valeur des biens et services se calcule en cigarettes, et où le commerce entre les casernes contribue à réduire les écarts de prix.

Au cours des deux conflits mondiaux, les occupants émettent des pièces de monnaie et des billets de banque spéciaux dans les territoires sous leur domination afin de maîtriser l’économie locale. Parallèlement, les gouvernements en exil impriment leur propre monnaie en prévision de la libération. Dans l’Allemagne occupée de l’après-guerre, deux unités de troc, soit les billets militaires des forces alliées et les cigarettes, ont cours simultanément avant la réforme monétaire qui mènera à l’introduction du mark allemand, en 1948.

Cet article représente une partie de la publication nommée Si l'argent m'était conté - La collection nationale de monnaies du Canada de la Banque du Canada

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