Les frais de scolarité

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La loutre
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Re: Les frais de scolarité

Messagepar La loutre » Mer Avr 20, 2011 10:46 am

Il y a plusieurs pistes à explorer côté financement de l'éducation, mais pour moi, il y a 2 critères que toute "école supérieure" québécoise devrait satisfaire:
1. l'accessibilité à l'éducation
2. des exigences élevées pour l'acquisition d'un diplôme.

En résumé, il faut que quiconque puisse accéder à des études qui lui permettront de pratiquer le métier qu'il aime.
En contrepartie, il ne faut pas non plus, comme c'est le cas présentement dans certains départements, distribuer les diplômes à quiconque se rend au bout du corpus d'étude, autrement le diplôme ne vaudra plus grand chose: il faut qu'à travers son cheminement, l'étudiant satisfasse un certain standard.
J'ai côtoyé des gens au BES, qui allaient bientôt être enseignant(e)s en français au secondaire, et je peux vous dire que les mailles étaient assez larges, que certains n'étaient définitivement pas en mesure de distribuer un enseignement de qualité à leur futurs élèves.

On parle de vaches à lait, mais il en existe à l'intérieur même de l'université. Je ne crois pas qu'il soit légitime d'exiger les mêmes frais de scolarité pour un étudiant, exemple, en médecine, et un autre en anthropologie.
Il y a quelques programmes, j'oserais avancer en particulier en sciences humaines, qui rapportent de jolis $ à une université, alors qu'on peut très bien se douter que ce n'est qu'une petite proportion des diplômés qui travailleront dans ce domaine.
Et souvent, ce sera pour l'enseigner à leur tour.

Il faut aussi voir les perspectives d'emploi après l'obtention d'un diplôme. Des bacheliers qui travaillent dans le commerce de détail faute d'emploi stable dans leur domaine, il y en a à la poche.
Des gens qui se font refuser des emplois parce que "surqualifiés", une manière de dire "t'es bon mais j'ai pas les moyens de payer ce que tu vaux", ça existe aussi.
Donc c'est super de s'endetter pour avoir un bon diplôme, encore faut-il que le salaire vienne avec un jour.

De plus en plus, la sécurité d'emploi disparaît. Avec la crise économique, plusieurs conventions ont été réouvertes, et ce sont les employés qui ont dû prendre sur leur dos. Dans plusieurs cas, les compagnies disaient "soit vous acceptez qu'on coupe dans les bénéfices & avantages sociaux, soit vous perdez carrément votre job."
La sous-traitance est à la mode, on voit davantage de contractuels, moins de permanents. Ceux qui se font employer restent souvent à statut précaire pendant plusieurs années.

Il faudrait aussi cesser de subventionner les écoles privées. C'est un non-sens que l'argent de la société puisse bénéficier à une école qui elle se donne le droit de choisir ses élèves. Encore ce matin on souligne la mauvaise condition physique de plusieurs écoles publiques. Investissons l'argent de tous dans des établissements accessibles à tous. Pour le privé, alors dépourvu de subventions, si des parents veulent payer 30 000$/année pour leur enfant, ce sera leur choix.

La pire affaire qui pourrait arriver, et c'est déjà en partie commencé, encore plus aux É-U et au Canada anglais je dirais, c'est d'ouvrir la porte au privé pour financer du matériel, des évènements, des projets.
Le privé a toujours un intérêt, et ne fais pas de cadeau. Il y a toujours une contrepartie, et celle-ci peut être très insidieuse.
Le milieu de l'éducation doit rester un terrain neutre, où l'on enrichit sa culture générale, où l'on confronte nos point de vue, où l'on apprend à vivre en société et à développer un esprit critique (Normand Baillargeon utilise la belle expression "cours d'auto-défense intellectuelle").
Et pour préserver sa neutralité et son sens critique, l'éducation doit rester imperméable aux $ du privé.
Je vous épargne les recherches que j'ai faites par le passé sur le rôle du privé en éducation, je dévierais le sujet, mais ce que j'en sais n'a absolument rien de réjouissant.

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Bidou
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Re: Les frais de scolarité

Messagepar Bidou » Mer Avr 20, 2011 1:07 pm

Salut La Loutre,

Toute une pause biberon :lol:

Je suis pas mal d'accord avec tes propos. mon plus vieux entre à l'université à l'automne et ca ne me dérange pas de payer plus cher si la qualité de l'enseignement est au rendez-vous.

Par contre je ne suis pas autant fermé au financement venant du privé en autant que l'argent aille dans un grand fond et que le privé ne puisse pas influencer l'enseignement autrement que par une présence dans les grands conseils d'administration. J'aime bien aussi l'idée que j'ai lu dans un journal de consacrer un % de la masse salariale des entreprises pour le financement de l'enseignement comme pour la R&D. :Étudiant:
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Re: Les frais de scolarité

Messagepar mysterious_dr_x » Mer Avr 20, 2011 9:29 pm

Je suis d'accord avec la loutre, les mailles sont parfois assez larges. Pas seulement à l'université, mais à tous les niveaux scolaires. À force de niveler par le bas, on en vient à perpétuer la médiocrité.
Je suis pour une augmentation des frais de scolarité, parce que le prix actuel est bien en dessous du coût réél à cause du gel. Selon moi, ça augmente le risque que les élèves ne prennent pas leur formation au sérieux et qu'ils passent quelques années de plus à l'école. C'est aussi une des causes du sous-financement des université, ce qui demande une certaine collaboration du privé.
Est-ce qu'au Québec, parce que nous subventionnons les études supérieures, nous avons un taux plus élevé de diplomation que dans les autres provinces? Je n'ai pas la réponse, mais ça serait intéressant à regarder. Si ça nous coûte si cher sans rapporter plus qu'ailleurs, on se fait avoir à quelque part.
Pour ce qui est des nombreux baccalauréats qui ne débouchent sur pratiquement rien, les cohortes seraient peut-être moins grandes si les étudiant(e)s payaient ce que leurs études coûtaient réellement. Le pourcentage de gradués chômeurs de ces programmes en serait diminué.
Enfin, pour les subventions au privé, un élève du privé coûte moins cher au gouvernement (donc à nous) qu'un élève du public, parce que la subvention est moins grande. Donc je ne suis pas tout à fait contre les subventions, puisque ça permet à un plus grand nombre d'étudiants d'y être, tout en diminuant les coûts totaux.
Tout un débat qui a été lancé ici :P

Nicolas F
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Description : J'ai toujours eu de l'intérêt pour la monnaie. Au début, je donnais mes pièces rares à ma mère, qui a aussi cette passion.

J'ai commencé à collectionner la monnaie pour moi il y a de cela peu de temps (2007).

J'ai cependant toujours aimé apprendre et collectionner les objets qui me fascinent. J'ai d'ailleurs une bonne collection de disques que je vendrai probablement sous peu.

Certains collectionneurs le font pour le plaisir uniquement. Je le fait aussi pour le plaisir mais je choisis mes intérêts en fonction de laisser un héritage à mes enfants (à venir). Quelque chose qui prendra donc un peu de valeur. Alors oui, j’essaie d’y trouver une valeur ajoutée.

J'ai découvert Numicanada en 2008. J'ai appris beaucoup sur ce site et je continue d'apprendre. Évidemment, je fais des erreurs de débutants mais j’apprends de ces erreurs.

Ce que j'aime de Numicanada c'est l'expertise et le constructivisme de plusieurs membres.

J’espère que la qualité du français ira en s’améliorant… Je vois ceci comme un héritage à conserver… Mais il faut y mettre l’effort, surtout qu'avec tous les outils disponibles, il n'y a pas d'excuse pour avoir une faute par mot !

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Re: Les frais de scolarité

Messagepar Nicolas F » Jeu Avr 21, 2011 8:49 am

La loutre a écrit : ...il ne faut pas non plus, comme c'est le cas présentement dans certains départements, distribuer les diplômes à quiconque se rend au bout du corpus d'étude, autrement le diplôme ne vaudra plus grand chose: il faut qu'à travers son cheminement, l'étudiant satisfasse un certain standard.

Je suis tout à fait d'accord


On parle de vaches à lait, mais il en existe à l'intérieur même de l'université. Je ne crois pas qu'il soit légitime d'exiger les mêmes frais de scolarité pour un étudiant, exemple, en médecine, et un autre en anthropologie.
Il y a quelques programmes, j'oserais avancer en particulier en sciences humaines, qui rapportent de jolis $ à une université, alors qu'on peut très bien se douter que ce n'est qu'une petite proportion des diplômés qui travailleront dans ce domaine.
Et souvent, ce sera pour l'enseigner à leur tour.

J'aimerais apporter une petite nuance ici. Il est vrai qu'une formation en médecine est plus coûteuse qu'une formation en théologie ou en anthropologie. Cependant, les universités tirent une bonne partie de leurs revenus des fonds de recherche octroyés aux chercheurs des facultés de médecine: Lorsqu'un chercheur reçoit une subvention, l'université reçoit habituellement un montant équivalant à 30% de cette subvention. Comme la recherche biomédicale est beaucoup plus dispendieuse que la recherche en théologie ou en mathématique, davantage de fonds sont octroyés en recherche biomédicale et, conséquemment, l'université reçoit des sommes considérables issues de la recherche biomédicale (en partie vrai pour ingénierie) comparativement aux autres types de recherche. Donc, dans ce sens, les Facultés de médecine sont payantes pour les Universités en récoltant beaucoup de frais indirects, qui sont redistribués dans toute l'université (ces fonds ne demeurent pas aux Facultés de médecine).


Le privé a toujours un intérêt, et ne fais pas de cadeau. Il y a toujours une contrepartie, et celle-ci peut être très insidieuse.
Le milieu de l'éducation doit rester un terrain neutre, où l'on enrichit sa culture générale, où l'on confronte nos point de vue, où l'on apprend à vivre en société et à développer un esprit critique (Normand Baillargeon utilise la belle expression "cours d'auto-défense intellectuelle").

Je ne suis pas d'accord ni tout à fait en désaccord et je crois qu'il faut inciter le privé à investir dans le système d'éducation. Après tout, ce sont leurs futurs employés qui sont sur les bancs d'école... C'est ce qui différentie les universités québécoises francophones des autres universités en Amérique du Nord: la pauvreté de leur fondation et le manque de philanthropes Québécois. Dans ce sens, j'applaudis les Jean Coutu de ce monde qui contribuent significativement à l'éducation (Jean Coutu ayant financé une bonne partie de la faculté de pharmacie de l'Université de Montréal). Plus les Québécois donneront aux fondations, mieux se portera le système d'éducation. Je n'ai aucune objection qu'afin de remercier les compagnies de leur dons, on nomme un Pavillon ou une salle de conférence en leur hommage. C'est un bien petit mal pour avoir une meilleure santé financière des écoles.


Et pour préserver sa neutralité et son sens critique, l'éducation doit rester imperméable aux $ du privé.
Je vous épargne les recherches que j'ai faites par le passé sur le rôle du privé en éducation, je dévierais le sujet, mais ce que j'en sais n'a absolument rien de réjouissant.

Ça m'intrigue. J'aimerais bien en savoir plus, ici ou en MP, à ta convenance.

Nicolas F
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Description : J'ai toujours eu de l'intérêt pour la monnaie. Au début, je donnais mes pièces rares à ma mère, qui a aussi cette passion.

J'ai commencé à collectionner la monnaie pour moi il y a de cela peu de temps (2007).

J'ai cependant toujours aimé apprendre et collectionner les objets qui me fascinent. J'ai d'ailleurs une bonne collection de disques que je vendrai probablement sous peu.

Certains collectionneurs le font pour le plaisir uniquement. Je le fait aussi pour le plaisir mais je choisis mes intérêts en fonction de laisser un héritage à mes enfants (à venir). Quelque chose qui prendra donc un peu de valeur. Alors oui, j’essaie d’y trouver une valeur ajoutée.

J'ai découvert Numicanada en 2008. J'ai appris beaucoup sur ce site et je continue d'apprendre. Évidemment, je fais des erreurs de débutants mais j’apprends de ces erreurs.

Ce que j'aime de Numicanada c'est l'expertise et le constructivisme de plusieurs membres.

J’espère que la qualité du français ira en s’améliorant… Je vois ceci comme un héritage à conserver… Mais il faut y mettre l’effort, surtout qu'avec tous les outils disponibles, il n'y a pas d'excuse pour avoir une faute par mot !

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Re: Les frais de scolarité

Messagepar Nicolas F » Jeu Avr 21, 2011 9:03 am

za75 a écrit :
+ 1

Nicolas F, lorsque je lis ton intervention et que je constate qu'un étudiant, au cours de 4 prochaines années, aura à payer des frais de scolarité de 3000$ de plus, qu'au cours des quatre dernières années, je suis persuadé, qu'avec l'ajustement des prêt et bourses, pour ceux qui en ont réellement besoin, il n'y a pas de quoi " fouetter un chat ".

Un gel des frais de scolarité, comme le souligne Nicolas F, ce n'est plus possible : " la vache à lait est en train de tarir ", ça se voit, non :?: Et les payeurs de taxes qui n'ont pas tous eu au fil des ans le privilège d'aller à l'université, sont pris à la gorge : ils sont soit sur le marché du travail ou bien, ils sont en chômage. Ne sont-ils pas obligés, pour un bon nombre, de couper dans leurs dépenses pour rejoindre les deux bouts. C'est bien court 4 ans, si on veut et si on peut investir dans son futur, non :?:

Il y a bien des lunes, de 1964 à 1967, lorsque j'ai fait mes études à l'Université Laval, mes parents ne pouvant m'aider financièrement, je n'avais que mon travail d'été et mes prêts et bourses pour vivre en appartement et payer mes études, à 100 KM de chez moi. J'avais aussi un vieux bazou, outil nécessité par mes travaux d'été dans différentes régions du Québec ( Joliette, Matane, Victoriaville et St-Hyacinthe ). Et, comme bien d'autres, j'ai réussi à " passer au travers ", tout en remboursant mes dettes.

Il demeure vrai, même en 2011, qu'il faut savoir ce que l'on veut, ce que l'on veut vraiment, et faire ses choix en conséquence, avec tout ce que celà nécessite.

En comparaison, le même choix s'impose dans la monnaie lorsqu'il s'agit de se procurer un livre ou de s'acheter une pièce : à chacun ses choix, mais il faut être responsable de ses choix et les assumer, sans toujours compter sur la " vache à lait " qui n'est pas une ressource renouvelable, ni inépuisable :oops: :wink:


Bien dit Za75. Je partage ton point de vue. Il y a des sacrifices à faire effectivement. J'avais 28 ans et je vivais en résidence à l'université parce que c'était tout ce que je pouvais me payer. Mais aujourd'hui, je récolte le fruit de mes efforts (investissement).

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Re: Les frais de scolarité

Messagepar La loutre » Jeu Avr 21, 2011 5:06 pm

Allô Nicolas F,
Voici un exemple récent-près-de-nous d'une entreprise s'immisçant dans les classes d'écoles:
http://www.cyberpresse.ca/chroniqueurs/ ... temple.php
http://www.ruefrontenac.com/nouvelles-g ... b-illegale

Comme j'étudiais pour enseigner au secondaire, je me concentrais davantage sur ce niveau dans mes lectures/recherches. Reste que ça ne change rien sur le fond, le principe s'applique aussi bien aux niveaux collégial et universitaire.

Je vais faire mon paresseux et me contenter de te copier/coller une intervention que j'avais faite sur un forum de jadis-futurs profs, et où j'abordais la question du privé par le biais des TIC (Technologies de l'Information et de la Communication). Ça m'évitera aussi de passer trop de temps à rédiger car oui, monsieur Bidou, il y a toujours les biberons! :lol:

Voici donc comment j'avais abordé la question, en novembre 2005:

"J'aimerais aborder une autre facette de l'arrivée des TIC dans les écoles dont il n'a pas été question ici, je crois.
Lorsqu'on dit que les supports matériels nécessaires à l'implantation d'un programme basé sur les TIC (ordinateurs, matériel audiovisuel, caméras vidéo, logiciels, accès à internet...) ne coûteront presque rien, il faut se demander pourquoi.

En effet, de plus en plus, les employeurs exigent une main d’œuvre possédant un minimum de formation dans le domaine technologique. Croyez-vous que c'est le gouvernement, qui n'arrive pas à tenir ses bibliothèques scolaires à jour, qui finance l'achat de ce matériel? Pas vraiment. Ainsi, l’école, déjà aux prises avec d’importantes contraintes budgétaires, doit chercher d’autres sources de financement pour payer ces équipements, et on ne parle pas ici de faire du porte à porte pour vendre du pain aux bananes. Si certaines écoles privées peuvent se permettre de telles dépenses, les écoles publiques risquent de devoir ouvrir la porte au partenariat commercial et aux commanditaires. Le mot "risquent", ici, est bien pesé.
En effet, je suis de ceux qui se méfient de la perspective des formules PPP, mais je veux en même temps rester ouvert à toute offre raisonnable. Ce que j'entend par "offre raisonnable", c'est un compromis où chacun y trouve son compte, mais, et c'est fondamental, où l'éducation de l'élève ne fait pas partie des négociations. Je m'explique.

De tels partenariats existent déjà aux États-Unis et dans l'ouest canadien (incluant l'Ontario). Ce qui a souvent été observé, c'est que certaines compagnies arrivaient en traînant avec elles leur programme éducatif. Ils défendaient cette pratique ainsi: « Tant qu’à apprendre, autant le faire sur du concret, c'est-à-dire travailler sur notre compagnie, parler des marques qu’ils préfèrent et dire pourquoi, trouver un logo pour un nouveau produit.» En plus, en bons philantropes, plusieurs fournissent les manuels scolaires...
J'ignore si c'est moi, mais j'inclus dans les devoirs de l'enseignant une certaine neutralité dans son discours et dans son comportement, en ce sens qu'il est en situation d'autorité, en plus de disposer d'une tribune importante. Je crois qu'un enseignant ne doit pas s'empêcher de dire son opinion sur certains sujets s'il le désire, mais qu'il doit apporter les nuances nécessaires afin de ne pas présenter son opinion aux élèves comme une vérité.
Alors est-il possible d'ouvrir la porte aux compagnies et à leurs bébelles sans sacrifier une certaine autonomie de pensée? J'ai fait mon stage II à mon ancienne école secondaire, et j'avoue avoir éprouvé un certain malaise à voir le nombre de machines distributrices éparpillées dans l'école, machines absentes à l'époque, jadis, autrefois... Sans compter qu'on assiste à une prolifération de ces "concours Visa", "prix d’excellence Pepsi", etc.

L'université Laval n'échappe pas au phénomène: observez le campus, avec ses pavillons La Laurentienne (d'un chic, ma foi!), Desjardins, Abitibi-Price, avec ses publicités tapissées jusqu'aux toilettes (au moment où nous sommes le plus vulnérable), sans compter le courrier pour nous proposer, en tant qu'étudiants privilégiés, des cartes de crédit de toutes sortes!

Dans son célèbre essai No Logo, Naomi Klein présente le cas intéressant de Channel One (américain) et du Youth News Network (canadien). Ces compagnies ont proposé aux écoles le "deal" suivant: ils fournissent gratuitement tout l'équipement technologique nécessaire, soit des salles d'ordinateurs, une télévision par classe, etc. Gratuitement? En fait, en échange, l'école accepte que Channel One (ou le Youth News Network) présente 12 minutes d’émissions d’actualités pour adolescents par jour, 12 minutes en incluant 2 minutes de publicité.
On dira que ce ne sont que deux misérables minutes. Soit! Mais ces 2 minutes sont destinées à un auditoire idéal (la présence en classe étant obligatoire) et il est impossible de régler le volume lors de la diffusion. Ainsi, aucun revenu direct n’est perçu par l’école, cependant qu’ils peuvent utiliser le matériel fourni pour d’autres cours.
Mais ce n'est pas tout...

Il existe un logiciel de navigation appelé ZapMe!, et qui est offert gratuitement dans certaines écoles américaines depuis 1998. Vous vous doutez bien que ZapMe! n'est pas un logiciel comme les autres, et vous avez bien raison de pratiquer le doute cartésien à un moment aussi propice. Ainsi, ZapMe! recueille des informations sur ses élèves usagers (sexe, âge, sites visités, préférences…), informations retransmises aux compagnies qui peuvent alors construire des publicités TRÈS ciblées. Et ces publicités sont, je vous concède un morceau de robot, ensuite retransmises sur les ondes de Channel One.

Je vous ai mis des exemples extrêmes pour bien montrer le côté insidieux de la venue des TIC dans les établissements scolaires. Loin de m'opposer à ce phénomène, moi qui ne souhaite que la propagation du savoir et de la culture à tous vents, je suggère simplement de rester prudent par rapport à ce qu'on nous propose.
Si Wal-Mart vous vend des bébelles pas chers, pensez que vos économies se font nécessairement sur le dos de quelqu'un, quelque part."

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Description : J'ai toujours eu de l'intérêt pour la monnaie. Au début, je donnais mes pièces rares à ma mère, qui a aussi cette passion.

J'ai commencé à collectionner la monnaie pour moi il y a de cela peu de temps (2007).

J'ai cependant toujours aimé apprendre et collectionner les objets qui me fascinent. J'ai d'ailleurs une bonne collection de disques que je vendrai probablement sous peu.

Certains collectionneurs le font pour le plaisir uniquement. Je le fait aussi pour le plaisir mais je choisis mes intérêts en fonction de laisser un héritage à mes enfants (à venir). Quelque chose qui prendra donc un peu de valeur. Alors oui, j’essaie d’y trouver une valeur ajoutée.

J'ai découvert Numicanada en 2008. J'ai appris beaucoup sur ce site et je continue d'apprendre. Évidemment, je fais des erreurs de débutants mais j’apprends de ces erreurs.

Ce que j'aime de Numicanada c'est l'expertise et le constructivisme de plusieurs membres.

J’espère que la qualité du français ira en s’améliorant… Je vois ceci comme un héritage à conserver… Mais il faut y mettre l’effort, surtout qu'avec tous les outils disponibles, il n'y a pas d'excuse pour avoir une faute par mot !

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Re: Les frais de scolarité

Messagepar Nicolas F » Jeu Avr 21, 2011 8:06 pm

Bonjour La Loutre,

En effet, les compagnies sont partout. Dans mon intervention précédente, je mentionnais des exemples concernant le nom des pavillons ou des salles de cours. Je suis tout à fait d'accord à limiter ça là.

En effet, je ne crois pas que le matériel pédagogique provenant de McDonald, de la CSN ou de la FTQ soit bienvenue dans les écoles, partageant ici ton point de vue. Je n'ai rien contre le fait d'avoir un Pavillon Jean Coutu, Desjardins ou La Laurentienne. Comme les lois fiscales font en sorte que les compagnies paient de moins en moins d'impôts, je ne peux qu'être satisfait de les voir donner un peu de sous aux écoles. Dans un monde idéal, les corporations paieraient des impôts et ceux ci seraient utilisés pour soutenir le système d'éducation public. Mais la compétition étant ce qu'elle est (blame it on the system), les gouvernements pensent que c'est la meilleure solution afin de garder ces entreprises ici. Donc, au moins les compagnies donnent où ça leur donne une image corporative intéressante et où sont localisés leurs futures employés et/ou consommateurs. Mais au moins, ils participent un peu à la société

Je suis conscient cependant qu'un petit cours aux étudiants concernant la consommation et comment les entreprises font pour leur faire acheter des produits serait un atout.

Mais de la pub, il y en a partout. Quand j'étais jeune et que j'écoutais la télévision le samedi matin, Les compagnies Kenner, Matel et Hasbro se faisaient un malin plaisir à m’inonder de pubs de jouets. Je ne suis pas pour autant tombé dans le panneau (merci à mes parents) afin d'acquérir le tout même si j'aurais bien voulu à l'époque...

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Re: Les frais de scolarité

Messagepar La loutre » Ven Avr 22, 2011 10:32 am

Nicolas F a écrit :Je suis conscient cependant qu'un petit cours aux étudiants concernant la consommation et comment les entreprises font pour leur faire acheter des produits serait un atout.

Oui! Dans une société où la sollicitation publicitaire est aussi omniprésente qu'agressante, c'est essentiel à mon avis. Autant qu'on n'aurait jamais dû retirer les cours de FPS.

Le hic avec les entreprises privées, c'est qu'une fois qu'elles ont le pied dans la porte, ne serait-ce "qu'un nom à un pavillon", n'en restent pas là.
À moyen-long terme, je suis persuadé qu'elles installent peu à peu leur manière de faire, leur vision, leur philosophie.
En cas de réticences ou d'opposition, elles changeront de stratégie et se réajusteront tout simplement.

À l'université Laval, il y a eu le feuilleton du projet "supermarché-école" il y a quelques années (2006-2007): http://www.quebecurbain.qc.ca/2006/05/1 ... offensive/
http://www.scom.ulaval.ca/Au.fil.des.ev ... arche.html

Puis, devant le tollé, on a mis ça sur la glace: http://ww.libredepenser.net/societe/edu ... -tablettes

Finalement, on apprend il n'y a même pas 1 mois la chose suivante:
Image


J'ai l'impression qu'en agissant de la sorte, on crée d'abord un "partenariat" qui paraît bien inoffensif. Grosso modo, de l'argent contre de la visibilité, en toute amicalité.

Puis, avec les années, comme tout se passe bien, l'entreprise toujours en besoin de visibilité et l'école toujours en besoin de financement concluent de nouvelles ententes, développent de nouveaux cours, engagent d'autres enseignants (pardon, des "chargés de cours"), offrent même de temps à autre des activités sociales, des conférenciers, etc.
C'est à travers tous ces intervenants, toutes ces structures, que la compagnie cherchera non plus seulement à investir et s'afficher, mais aussi à s'investir dans le contenu même.

Une fois que le département est habitué à fonctionner avec ces fonds, il devient difficile de s'en passer, et au bout d'un certain temps, la compagnie qui subventionne peut se permettre d'avancer lentement ses pions, détenant toujours l'ultime menace, celle de plier bagages et de rediriger son financement en des lieux qui se montreront plus conciliants.

Maintenant, croyez-vous qu'un étudiant qui reçoit disons 10 000$ d'une compagnie pour son projet de recherche, sera à l'aise, advenant le cas, d'émettre des critiques négatives sur l'entreprise qui le subventionne?
Le laissera-t-on seulement publier tel quel son rapport ou l'amènera-t-on à diluer ses affirmations, à présenter "l'autre côté de la médaille", à "réévaluer".
Cet étudiant sera-t-il à l'aise de faire une autre demande de $ pour son prochain projet?
Lui accordera-t-on d'après vous?

Et advenant le cas où un projet d'étude est très positif pour les produits de l'entreprise, ne pensez-vous pas que celle-ci soit contente de pouvoir bénéficier du sceau d'autorité de telle université?
C'est ce qui me dérange le plus là-dedans. Qu'un amphithéâtre privé vende ses droits d'affichage au plus offrant, aucun problème.
Mais là, on parle d'un lieu d'éducation, de savoir, où l'on doit tendre, dans la mesure ou c'est humainement possible, vers l'objectivité.
L'école doit être et rester un terrain neutre où l'on doit confronter ses idées/opinions, où l'on a entièrement le droit d'émettre une préférence pour un produit x.
Toutefois, l'école comme établissement ne devrait jamais laisser transparaître qu'elle penche pour un parti plus que l'autre.

Car en évoluant dans un environnement influencé par une compagnie X, n'y a-t-il pas danger pour les étudiants d'en venir à considérer cet environnement comme étant une référence objective, ce qu'il n'est pas?

J'ai repensé à cette spécialiste qui est passée à Enquête, dans le récent reportage "Tamiflu Inc." (regardez autour de 5:00/5:30):
http://www.radio-canada.ca/audio-video/ ... 0200_m.xml


Et pour revenir (enfin!) à la question initiale, concernant les frais de scolarité, il faut aussi se demander, autant les étudiants sur le plan personnel que les établissements au sujet des équipements, si on ne peut pas couper quelque part dans les dépenses d'abord.
Dépendant des domaines d'étude et du niveau, il y a des moments où l'on peut avoir besoin de d'équipements précis et de technologies de pointe, mais il y a peut-être aussi des moments où un crayon, du papier et un enseignant allumé peuvent très bien faire l'affaire.


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