En 1977, pour les 10 ans de la série de 1967, John Regitko avait rencontré Alex Colville.
Cette entrevue de style question-réponse a été reproduite dans le CCN Vol.51, no. 10, et j'ai pensé vous ramener quelques passages intéressants et/ou étonnants.
-Aucun thème n'était imposé pour la série de 1967. Tout ce qui était imposé était la légende "CANADA 1867-1967" qui devait se retrouver quelque part au revers.
Aucune obligation non plus d'avoir un thème commun pour les six motifs.
Les artistes devaient par contre justifier le choix de leurs motifs.
Colville pense même que les six motifs retenus auraient pu provenir de six artistes différents.
-Colville déclare qu'au niveau artistique, il considère les pièces canadiennes parmi les pires au monde.
-Jugeant qu'il n'y avait pas de personnalités canadiennes ou de bâtiments assez importants et célèbres pour se retrouver sur des pièces de monnaie, il a décidé de se tourner vers le thème de la faune.
-Au départ, c'était une compétition ouverte, tous pouvaient soumettre leurs idées de motifs. Devant l'avalanche de propositions, la MRC s'est ravisée et a plutôt demandé à 5-6 artistes de soumettre leurs motifs (outre Colville lui-même, on a aussi demandé à Dora de Pedery-Hunt et Julian Hebere).
-Colville a commencé à travailler ses motifs en octobre 1965, et fini les modèles en avril 1966. Il croit avoir passé 6 mois à travailler sur ce projet.
-Il fut payé 3000$ pour les motifs (somme aussi touchée par les autres artistes, sauf Hebere qui a dû rembourser après avoir été forcé de se retirer pour cause de maladie), et a ensuite touché 9000$ pour les modèles.
Total pour le travail: 12 000$.
-Colville décrit ses motifs comme "géométriques". Il recherche un équilibre dans les angles, soulignant que les angles dominants sont de 30 ou 60°. (ici, honnêtement, je traduis sans trop comprendre ce que je traduis...

)
-Colville mentionne que les pièces de la MRC ont très peu de relief, et que cela est très restrictif quand vient le temps de détailler les motifs.
Pour le 10¢, le relief était d'environ 6/1000 de pouce!
-Il compare nos pièces aux pièces US. Il croit que les pièces US sont peut-être moins raffinées, en ce sens qu'on est susceptible d'y trouver plus de défauts, mais que leur relief et leurs motifs leur procure une beauté que les pièces canadiennes n'ont pas.
-Colville a fait la légende de la 1ère pièce (laquelle?), et a donné le contrat des 5 autres à Walter Ott, un expert typographe, en le payant 500$.
Ainsi, toutes les légendes des revers ont été faits main.
Colville souligne que le processus de réduction a facilement fait disparaître les petites imperfections que ce travail manuel aurait pu laisser.
-Quand on lui demande s'il croit que les gens regardent leur monnaie, il répond que non, à part les collectionneurs et les enfants.
Il croit que ce désintérêt vient du fait que l'argent ne représente pas, pour la plupart des gens, un objet d'intérêt en soi. Pour les gens, l'argent a une fonction utile, point.
-Comme artiste, il a trouvé plus difficile d'avoir à travailler de concert avec d'autres gens, de ne pas tout décider seul.
En revanche, il a apprécié que ses oeuvres, d'habitude hors de prix pour bien des gens, puissent soudain se retrouver dans les poches de tout le monde.
-Les explications/descriptions originales des motifs de Colville ont été égarées. Il a dû les "refaire" pour les biens d'un communiqué de presse. Aux dernières nouvelles, on ne sait pas ce qu'il est advenu des originales.
-Des motifs originaux dessinés en tons de gris (pour simuler le relief) ont été envoyés en Nouvelle-Écosse à l'été 1973 pour être exposés aux touristes.
Ces originaux ont passé l'été dans la vitrine d'une pharmacie, sans être couverts ou protégés.
-Colville s'indigne aussi que le Canada ait un papier monnaie aussi laid (on est en 1977). Il rappelle qu'au final, le coût pour créer et développer des motifs ne représente qu'un pourcentage ridicule du coût total, et que du fait nous devrions être plus innovateurs de ce domaine.
